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L'école des Victorieux à Lomé (Togo) fait partie des étbalissements accompagné par l'association Ana-Nour

Retours d'enseignants : les tatas des Victorieux

Le projet Ana-Nour pour le partage de la Neuroéducation en Afrique francophone fête ses trois ans en cette année 2022, lors de la création de l’association, seulement trois écoles étaient partenaires. En août 2022, la formation Ana-Nour a rassemblé plus d’une centaine d’enseignants venant de 22 établissements scolaires différents. L’équipe pédagogique du complexe scolaire Les Victorieux s’est engagée dans le projet de l’association depuis ses tout-débuts, porté par Lisa la directrice des maternelles et Tata Mawuli.

Chaque année de plus en plus de professeurs de cet établissement scolaire rejoignent le programme de formation, avec un total de 25 enseignants sur la dernière session. Après 3 années d’accompagnement, l’équipe des services civiques est allée à la rencontre de Tata Jeanne, Tata Brigitte et Tata Sylvia, trois enseignantes de la classe de maternelle Ana-Nour. Ce fut l’occasion d’un temps d’échange sincère et complice avec ces trois femmes qui s’épanouissent dans leur métier.

Ana-Nour, Les tatas de la classe maternelle des Victorieux à Lomé
Tata Jeanne
Ana-Nour, Les tatas de la classe maternelle des Victorieux à Lomé
Tata Sylvia
Ana-Nour, Les tatas de la classe maternelle des Victorieux à Lomé
Tata Brigitte

Jeanne : J’ai découvert l’association Ana-Nour à travers Stéphanie la présidente de l’association. Elle connaissait Soké qui, à cette époque, enseignait aux Victorieux. Stéphanie nous a parlé d’Ana-Nour et de la formation sur la neuroéducation qui allait débuter au mois d’août 2019. Pour mener à bien le projet, elle avait besoin de quatre éducatrices pour lancer la classe maternelle Ana-Nour et je me suis portée volontaire. J’ai tout de suite été intéressée par cette méthode pédagogique qui se base sur l’autonomie de l’enfant. Cela fait maintenant 3 ans que je suis la formation et que j’enseigne dans une classe 100% Ana-Nour. Nous sommes trois enseignantes à tenir la classe et nous sommes toujours aussi motivées, nous participons à chaque Neuro Meeting (webinaire) afin de nous améliorer encore davantage. A chaque webinaire et chaque nouvelle formation nous apprenons de nouvelles choses et nous réactivons les connaissances déjà vues auparavant.

Ana-Nour, Les tatas de la classe maternelle des Victorieux à Lomé

Les formations animées par les formateurs d’Ana-Nour vous ont-elles aidées quant à votre manière d’enseigner ?

Jeanne : Oui, cela m’a beaucoup aidé. Avant nous imposions les activités aux enfants. Lorsque l’enseignant bride les enfants, il se répète beaucoup et rencontre parfois des oppositions de la part de ces derniers. Désormais nous respectons le développement naturel de l’enfant, ce qui fait que nous sommes beaucoup moins dans l’autorité et la hiérarchie. Dans la classe Ana-Nour l’enfant est plus autonome, il choisit lui-même son activité (parmi une sélection  proposée) et nous sommes là pour le guider et l’aider dans les apprentissages. L’enseignement paraît plus fluide et naturel.

Brigitte : Ce qui m’a été bénéfique dans la formation Ana-Nour est, entre autres, l’apprentissage de la patience. Avant je m’énervais trop vite et je criais sur les enfants, ce qui n’était finalement pas efficace. Maintenant, je prends plus de temps si un élève en a besoin.

Ana-Nour, Les tatas de la classe maternelle des Victorieux à Lomé

Jeanne : La classe est organisée pour que les enfants soient autonomes. Ils font des activités, qu’ils choisissent eux-mêmes, en petit groupe de 2 ou 3 enfants. Chaque groupe fait une activité différente et dans chaque groupe, les âges sont mélangés. Dans une classe standard les activités ne sont pas les mêmes et elles sont collectives. Je trouve aussi que la classe est plus calme car les enfants sont plus concentrés.

Brigitte : Dans une classe standard, le suivi est moins individualisé du fait que les activités soient collectives, si 2 ou 3 enfants n’ont pas compris, l’enseignant ne va pas forcément s’en rendre compte car il doit gérer la classe dans son ensemble. Chez Ana-Nour, chaque petit groupe travaille en autonomie et nous circulons dans la classe afin de vérifier si l’activité est bien assimilée par chaque enfant. La motivation des enfants est aussi prise en compte : si un enfant montre une envie de compter, nous allons l’aider et le pousser pour qu’il aille plus loin encore. Si un enfant a envie, l’apprentissage se fait dans la joie, donc plus naturellement.

Ana-Nour, Les tatas de la classe maternelle des Victorieux à Lomé
Soké ATIDEKA, coordonateur pédagogique Ana-Nour au Togo en visite à l'école des Victorieux.

Jeanne : Je me souviens que, la première année, les parents n’étaient pas du tout d’accord. Je dirais même qu’ils étaient méfiants. Il faut savoir qu’au Togo, la maternelle dure deux années, la section 1 et la section 2. Après la maternelle, l’enfant passe au CP1 en primaire, puis au CP2.

Même si, après les 3 ans de maternelle en classe Ana-Nour, les enfants passent directement au CP2, les parents craignaient que leur enfant prenne du retard en restant 3 années en maternelle et donc qu’il n’ait pas le même niveau que les autres enfants ayant fait le CP1.

Pour la première année nous avons décidé de prendre les enfants de parents volontaires, majoritairement des enseignantes de l’école, et la classe Ana-Nour a été créée avec un effectif assez bas. Aujourd’hui les parents veulent mettre leur enfant dans la classe Ana-Nour car ils voient, lors des présentations de fin d’année, le travail des enfants de cette classe : ils sont éveillés et ont acquis des connaissances que les autres enfants de maternelle n’ont pas. Cette année nous avons dû refuser des enfants dans la classe car nous ne voulions pas dépasser 25 enfants afin que l’enseignement reste de qualité pour chacun d’entre eux.

Ana-Nour : Les tatas de l'école des Victorieux à Lomé

Voyez-vous une différence sur la relation que vous avez avec les enfants dans cette classe nouvelle génération et les classes que vous aviez avant ?

Jeanne : Tout d’abord les enfants sont plus motivés, ils sont très intéressés par le matériel car ils apprennent de manière ludique sans même s’en rendre compte. Ils ont envie de découvrir un nouveau matériel chaque jour. En outre, il y a beaucoup d’entraide entre les enfants, lorsqu’ils arrivent en primaire au CP2, ils continuent à s’entraider, ils ont plus de facilité à travailler en groupe. Notre relation avec les enfants est plus individualisée et moins hiérarchisée, ils sont à l’aise avec nous car nous sommes là pour les aider et non pour les réprimander, il y a une relation de confiance.

Avez-vous rencontré des difficultés pour mettre en place cette nouvelle manière d’enseigner ?

Brigitte : Tout à fait, cela n’a pas été facile au début notamment pour réussir à occuper tous les enfants lorsque nous étions concentrées à présenter une activité à un groupe de 3 ou 4. Il a fallu faciliter l’autonomie des enfants et cela n’a pas été facile. Il a aussi fallu perdre nos habitudes d’enseignement classique pour s’adapter à de nouvelles pratiques. Avec le temps nous avons trouvé le bon équilibre.

Ana-Nour : Les tatas de l'école des Victorieux à Lomé

Retournerez-vous à une pratique pédagogique classique maintenant que vous connaissez la Neuroéducation ?

Brigitte et Jeanne : Non, non, non, l’Etat est d’ailleurs en train de changer la méthode ce qui montre qu’il faut qu’elle évolue. Nous apprécions vraiment travailler dans une classe qui s’appuie sur la Neuroéducation, nous éprouvons plus de plaisir à exercer maintenant car nous guidons les enfants et nous voyons qu’ils sont épanouis.

Jeanne : Je suis toujours agréablement surprise quand je vois les petits corriger les grands lorsqu’ils font la lecture le matin en arrivant dans la classe.

Brigitte : Lorsque les grands sont en leçon en regroupement, les petits sont curieux et parfois ils écoutent et récitent la leçon comme les grands, c’est toujours un étonnement de voir qu’ils connaissent déjà certaines choses.

 

Nous sommes fières du travail que fournissent les enseignantes de la classe Ana-Nour des Victorieux, un grand merci à elles pour leur implication.

Adrien Lacorte, Marie Devinat et Margot Daviaud

L’équipe des services civiques 2022-2023